Échelle 1…
Alors que certains matériels roulants poursuivent leur mue dans le secret des Grands Ateliers SNCF, d’autres s’exposent déjà fièrement devant un public conquis. C’est le cas de l’Aigle présenté en décembre 1969 au Salon de l’Enfance du Bourget. Installée au centre des allées parmi les jeux, jouets et autres stands dédiés à l’apprentissage, la locomotive de 1846 attire tous les regards. À la veille des fêtes de Noël, elle s’impose comme un élément féerique ravissant petits et grands. La Vie du Rail de s’interroger : “le chemin de fer est-il le plus beau jouet du monde ?”
… et modèles
réduits
Dans ce contexte, la plus ancienne locomotive conservée du continent européen n’est pas en reste. Beaucoup se souviennent encore du poste à transistors-Buddicom édité par La Vie du Rail la même année. Objet de plastique aux entrailles d’acier, celui que l’on qualifierait aujourd’hui de “produit dérivé” rend d’ores et déjà hommage à la future star du Musée Français du Chemin de Fer. Et n’ayez crainte pour votre salon, comme le précise la réclame, “elle ne nuira pas à la décoration de votre appartement”.
Le Rail Miniature Club Alsace Sud (RAMCAS)
HO, N, 0, 1, Z, et G, le chemin de fer ne serait rien sans ses modèles réduits. La réalisation de ces derniers nécessite de multiples savoir-faire : expertise ferroviaire, architecturale et paysagère, observation, compétences en menuiserie, peinture, électronique et numérisation. Dans ce cadre, le Musée Français du Chemin de Fer ne pouvait se passer d’une telle représentation.
Rendez-vous est pris pour la première fois en décembre 1970 Chez Dondon, lieu incontournable pour les amateurs de trains miniatures. Un groupe de passionnés réunis dans ce magasin aujourd’hui disparu du 17 rue Mercière pose alors la première pierre de ce qui deviendra le Rail Miniature Club Alsace Sud. Répondant au nom de “RAMCAS”, ce club interne au musée ne cessera de promouvoir son activité au fil des décennies.
De nos jours, le Salon du Modélisme proposé chaque année au mois de septembre permet à un public toujours plus large de découvrir les trains miniatures savamment exposés au pied de leurs grands frères à l’échelle 1.
Mois après mois disparaissaient des entreprises textiles, contraintes à la cessation d’activité sous la pression de la concurrence des pays à bas salaires et ayant de ce fait, cessé d’être compétitives. Il allait bien falloir imaginer de nouvelles activités pour notre région. Alors, pourquoi ne pas penser à participer à un phénomène nouveau qui se faisait jour et que l’on commençait à appeler la “civilisation des loisirs” ?
Jean-Mathis Horrenberger
in Le Musée Français du Chemin de Fer : une utopie devenue réalité, 1997
Mulhouse
70’s
Les années 70 constituent une période charnière pour la ville de Mulhouse, notamment dans le domaine social, urbain, architectural et culturel. Dès 1968, le colloque de Mulhouse permet de poser les bases de la redéfinition de la politique culturelle et touristique de la cité alsacienne. Le dialogue entre les institutions artistiques en place, le renouvellement de l’offre culturelle et le développement de la desserte de la ville semblent dans ce contexte s’imposer comme des facteurs nécessaires à son attractivité.
Le début des travaux de l’autoroute A36 reliant Beaune à Mulhouse et l’ouverture du nouveau terminal passagers de l’aéroport de Bâle-Mulhouse en 1970 participent de ce phénomène. Symbolisant la rencontre de la France, de l’Allemagne et de la Suisse, l’imposante silhouette de béton armé de la Tour de l’Europe, œuvre de l’architecte-urbaniste François Spoerry, s’élève simultanément peu à peu sur la ville aux cent cheminées. À quelques kilomètres de là, le chantier du Musée Français du Chemin de Fer s’inaugure…
Mulhouse-Nord
Dès la fin des années 60, l’architecte Pierre-Yves Schoen élabore les plans de ce qui deviendra le musée définitif de Mulhouse-Dornach en 1976. Entre 1971 et 1976, c’est ainsi l’une des demi-rotondes du dépôt de Mulhouse-Nord qui est choisie pour abriter l’exposition transitoire du Musée Français du Chemin de fer.
Localisé au sein de la gare de triage édifiée en 1889, ce bâtiment aujourd’hui détruit, présente l’avantage de pouvoir déplacer aisément les premiers trains de la collection tout en les exposant dans leur “environnement naturel”. À cette muséographie d’opportunité se confronte cependant la nécessité d’organiser l’accueil des visiteurs.
C’est dans un entretien accordé à un journaliste de L’Alsace à bord d’un turbotrain en septembre 1970 que Jean-Mathis Horrenberger révèle les coulisses de ce chantier ferroviaire et muséal. Après avoir présenté les clauses qui unissent la SNCF à l’AMFCF concernant l’occupation temporaire des lieux, le Président précise que plus de 8000 cartes d’adhérents ont d’ores et déjà été envoyées à travers le pays. Sept mois plus tard, en avril 1970, le premier coup de pelle est donné. Pose des grillages, installation d’un transformateur, construction de la guérite de caisse, création de l’accès réservé au personnel du musée, raccordement de la passerelle d’accès à l’espace d’accueil sont autant d’étapes qui rythment les mois précédant l’ouverture au public.
Ouverture
des portes !
Les housses ont été retirées des locomotives, les matériels ont été dépoussiérés, le personnel a été recruté, la signalétique est plantée…
Le 12 juin 1971, le Musée Français du Chemin de Fer de Mulhouse ouvre ses portes au public, accueilli tous les jours de 10h à 18h.
Rendez-vous au prochain chapitre pour lever les rideaux métalliques de ce musée ferroviaire qui deviendra par la suite le plus grand d’Europe.